Par Guillaume 7 janvier 2022 Dans Expériences

Témoignage : être graphiste et daltonien, c’est possible !

Pas facile de se lancer, hein. Rien que cet article pourrait me fermer des portes voire porter atteinte à ma carrière. Malgré tout j’ai envie que mon témoignage serve d’exemple. Je veux casser les préjugés sur le daltonisme. Je veux rassurer et montrer qu’il est tout a fait possible d’être daltonien et graphiste (ou tout métier en rapport avec l’art visuel).

Une anomalie encore assez mal connue

On entend tout et n’importe quoi sur le daltonisme. On se rend compte assez vite que de nombreuses personnes connaissent finalement très mal cette anomalie génétique, alors que de nom elle est connue de tous.

Déjà pour commencer, le daltonisme n’est pas une « maladie », donc il faut arrêter d’utiliser ce mot. Celui d’anomalie génétique est davantage approprié. Plus précisément, il s’agit d’une mutation sur les chromosomes X ou 7, selon les cas. De plus, il existe différents types de daltonisme, et à différents degrés. Donc chaque daltonien a une perception différente des couleurs, et ce n’est pas forcément handicapant. Il y a même des personnes qui sont daltoniennes sans le savoir !

Chaque daltonien est différent

Poisson Fécond ci-dessous qui explique le daltonisme de manière claire et humoristique. Donc avant de passer à la suite, je vous invite à regarder la vidéo tant que vous n’êtes pas incollables sur le sujet haha.

Victimes de discrimination

De la petite blague peu amusante du genre « C’est qu’elle couleur ça ? Et ça ? » au licenciement abusif lorsqu’un patron apprend que son employé est daltonien, nous en avons vu de toutes les couleurs ! (vous l’avez ?). Les daltoniens doivent combattre les préjugés.

C’est l’instant anecdote. J’ai un ex-collègue graphiste qui avait eu le malheur de dire qu’il était daltonien. À partir de là, il se prenait régulièrement des remarques blessantes du genre « Un graphiste daltonien ? Nan mais quelle blague ! » ou « Change de métier ! ». Heureusement pour lui, il ne s’est pas fait licencier pour ça. De mon côté, je gardais mon histoire de daltonisme secret, car j’avais peur de subir le même sort. Même lui ne savait pas pour mon cas. Ça me désolait de ne pas pouvoir l’aider, mais je compatissais pour lui.

Apprendre à vivre avec le daltonisme

Je suis donc diagnostiqué en tant que protanomal léger. Si vous avez bien suivi la vidéo, vous comprendrez donc que j’ai davantage de mal à percevoir le rouge. Je vois le rouge, et même bien, c’est juste que pour moi, le rouge ressort moins vif, moins saturé que la normale.

Mon daltonisme est léger et m’handicape très peu au quotidien. Étant donné que je perçois moins le rouge, par conséquent je distingue moins de nuances quand le rouge est impliqué dedans. Par exemple dans des nuances de bleu foncé/violet, ou de vert kaki/marron qui seront très proches, je vais avoir du mal à les distinguer.

Il faut donc apprendre à vivre avec et faire travailler son cerveau par associations de couleurs. Je faisais beaucoup d’erreurs quand j’étais petit, mais aujourd’hui avec ma mémoire chromatique et ma déduction, je vais très peu me tromper.

Pourquoi être daltonien ne m’a jamais handicapé pour mon travail de graphiste

C’est tout simple, mais quand on est graphiste, on utilise toujours des codes couleurs (RVB, CMJN, Pantone…). Du coup forcément, ça permet de se guider. Ce n’est pas pour rien que ça existe, il s’agit d’un langage universel qui en dehors du cadre du daltonisme permet à chacun d’avoir des repères et de se comprendre.

Reprenons l’exemple du rouge.

Si je vois une nuance RVB avec l’indicateur R proche du 255, je me doute bien qu’il est constitué de rouge. Pour les non initiés, un rouge pur sera noté 255/0/0. Pareil pour le CMJN. Un document imprimé avec du rouge aura les taux de M (Magenta) et de J (Jaune) qui vont tendre vers le 100.

Dans les faits, au quotidien, mes clients qui ont déjà une charte graphique me donneront leurs codes couleurs et il me suffit de les suivre. Quand il s’agit de créer une charte graphique et choisir une couleur, je me base principalement sur le catalogue Pantone pour me repérer.

La preuve ? Aucun de mes précédents collègues ne s’en est rendu compte

En effet, j’ai toujours bien réalisé mon travail et aucun de mes précédents collègues ou clients ne s’est plaint ou m’a fait une remarque du genre « Il est bizarre ton vert, on dirait du marron« .

Je ne leur en ai jamais parlé parce que déjà, je considérais que ce n’était pas nécessaire, mais aussi parce que j’avais peur de subir de la discrimination. Si vous me lisez, vous vous dites probablement « Naaan, mais j’aurais jamais deviné ! » Si j’en avais pas parlé, vous ne l’auriez probablement jamais su.

Les plus vifs d’entre vous auront remarqué que même ma charte graphique Namba Studio est basée sur du rouge. Et pourtant, il y a rien d’anormal hein ?

Bref, j’espère vous avoir convaincu que pour mon cas, le fait d’être daltonien ne m’empêche pas de réaliser mon métier de graphiste.

En réalité, c’est au cas par cas

Je vous voir venir.

Vous allez me dire : Mais Guillaume, tu ne vas pas me faire croire qu’une personne achromatique peut faire ce métier vu qu’elle ne voit pas les couleurs ?

Et vous avez probablement raison.

Il est vrai que pour les personnes fortement atteintes, comme les tritanopes, deutéranopes et protanopes, il est difficile d’exercer ce genre de métier. Dans ces cas de figure le daltonisme est en effet bien plus handicapant.

Mais je voulais surtout faire nuancer le discours des gens, en leur montrant qu’il existe différents degrés et types de daltonisme. Une bonne partie des daltoniens sont le sont légèrement et le vivent bien. Il faut juste arrêter de les mettre tous dans le même panier, et de les discriminer injustement.


Si vous souhaitez me contacter, ça se passe ici.